Des scientifiques de l’EPFL ont découvert que les vibrations mécaniques dans les réfrigérateurs utilisés pour refroidir les ordinateurs quantiques à qubits supraconducteurs peuvent causer des erreurs, offrant de nouvelles perspectives pour améliorer l’informatique quantique.
Les ordinateurs quantiques, qui utilisent des bits quantiques ou «qubits» pour traiter l’information, ont le potentiel de résoudre des problèmes beaucoup plus rapidement que les ordinateurs traditionnels. Cependant, maintenir les qubits stables et minimiser les erreurs est un défi significatif que les chercheurs s’efforcent de relever.
Les qubits supraconducteurs, basés sur des jonctions Josephson, sont la plateforme de pointe pour l’informatique quantique en raison de leur contrôle rapide, leur haute fidélité et leur évolutivité, poursuivie par des entreprises majeures comme Google et IBM.
Malgré leur potentiel, leurs taux d’erreur sont principalement limités par leurs durées de vie quantique. Bien que des études considérables et des améliorations significatives aient été réalisées au cours des décennies pour allonger la durée de vie des qubits, les causes exactes des erreurs dans les qubits supraconducteurs ne sont pas entièrement comprises.
Les erreurs dans les qubits peuvent provenir de nombreuses sources, y compris les pertes diélectriques, les défauts dans les matériaux et les émissions spontanées. Jusqu’à présent, le rôle des vibrations mécaniques dans la causation d’erreurs n’était pas bien compris dans les dispositifs supraconducteurs, bien que ces vibrations puissent affecter la performance des ordinateurs quantiques.
Des chercheurs dirigés par le Professeur Tobias Kippenberg à l’EPFL ont découvert que les vibrations mécaniques provenant des systèmes de refroidissement utilisés dans les ordinateurs quantiques à qubits supraconducteurs peuvent causer des erreurs dans les qubits. Ces vibrations, provenant du refroidisseur à tube à impulsions dans un réfrigérateur à dilution, induisent des changements dans les qubits, les faisant commettre des erreurs simultanément.
«Des qubits supraconducteurs cohérents et stables sont essentiels pour réaliser l’informatique quantique. Cependant, à mesure que les qubits deviennent plus cohérents, ils deviennent également plus sensibles aux petits changements dans leur environnement» explique Shingo Kono, qui a dirigé le projet. «Nous avons capitalisé sur cette sensibilité pour enquêter sur les mécanismes d’erreur affectant les dispositifs supraconducteurs de pointe.»
Les chercheurs ont créé des qubits hautement cohérents en utilisant des processus avancés de nanofabrication et ont caractérisé leur performance au fil du temps. Les qubits supraconducteurs présentaient des «temps de relaxation» longs (le temps nécessaire pour qu’un système retourne à son état d’origine), dépassant 0,4 millisecondes, ce qui est significatif en soi, car des temps de relaxation plus longs sont utiles pour l’informatique quantique.
L’équipe a synchronisé leurs mesures avec le fonctionnement du refroidisseur à tube à impulsions pour voir comment les vibrations mécaniques affectaient les qubits. Cette approche innovante leur a permis de relier des vibrations mécaniques spécifiques aux erreurs dans les qubits.
L’étude a révélé que les vibrations mécaniques du refroidisseur affectaient toute la puce, causant des erreurs simultanées dans plusieurs qubits, connues sous le nom d’ «erreurs corrélées». Ce mécanisme d’erreur pose un défi significatif pour atteindre la tolérance aux pannes vers l’informatique quantique à grande échelle, car les protocoles de correction d’erreurs supposent strictement que les erreurs se produisent de manière indépendante.
«Bien que l’origine physique n’ait pas pu être déterminée de manière non équivoque dans ce travail, nos résultats approfondissent notre compréhension des mécanismes d’erreur des qubits» déclare Kono. «Plus important encore, nos observations fournissent des informations précieuses sur les stratégies potentielles de réduction des erreurs pour atteindre la tolérance aux pannes en découplant les qubits supraconducteurs de leurs environnements mécaniques.»
Fondation Nationale Suisse pour la Science (SNSF)
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EPFL